L’année 2024 aura été marquée par une série d’événements politiques et judiciaires majeurs en Guinée. Entre la dissolution du gouvernement, une tentative de coup d’État avortée, des arrestations, la fermeture de trois médias et des décès entourés de mystères, le pays a traversé des moments critiques.
Le lundi 19 février, un décret signé par le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, et lu à la télévision nationale par le général Amara Camara, secrétaire général à la présidence, annonça officiellement la dissolution du gouvernement de transition. Cette décision inattendue surprit l’ensemble de la classe politique et des observateurs.

Dans l’attente de la formation d’un nouveau gouvernement, l’expédition des affaires courantes fut confiée aux directeurs de cabinet et aux secrétaires généraux. Cette mesure radicale s’accompagna de dispositions strictes : restitution immédiate des véhicules de service et d’escorte, gel des comptes bancaires des anciens ministres, restitution des documents de voyage, et démobilisation de leurs gardes du corps.
Le lendemain, les intérimaires furent convoqués à une réunion à la présidence pour recevoir des instructions sur la gestion des affaires courantes. Officiellement, aucune raison ne fut donnée pour justifier cette dissolution. Toutefois, certains analystes évoquèrent des désaccords profonds et des problèmes d’efficacité au sein de l’exécutif.
Quelques mois plus tard, un autre événement fit la une des journaux. Le colonel Sadiba Koulibaly, ancien chef d’état-major général des armées et figure centrale de la junte du CNRD, décéda en détention le 22 juin. Condamné à cinq ans de prison pour « désertion et détention illégale d’armes » le 14 juin, il était détenu dans un lieu secret.

Selon le parquet militaire, il succomba à un arrêt cardiaque, probablement lié à un stress prolongé. Cependant, son avocat, Me Lancinet Diabaté, contesta cette version, affirmant que son client était en bonne santé avant son arrestation. Les zones d’ombre s’accentuèrent lorsque le certificat de décès, délivré par l’hôpital Ignace Deen, fut signé deux jours après la date annoncée du décès.

Sadiba Koulibaly, autrefois numéro deux du régime militaire, était tombé en disgrâce après un différend avec le président Doumbouya en 2023. Sa mort, survenue dans des circonstances troubles, souleva des questions sur les conditions de détention des opposants et l’état de droit en Guinée.
Le 17 septembre, un autre rebondissement judiciaire se produisit avec l’arrestation de Claude Pivi, ancien haut responsable du régime de Moussa Dadis Camara. Évadé depuis novembre 2023, il fut capturé au Liberia et extradé vers Conakry. Condamné en août 2023 à la réclusion criminelle à perpétuité pour crimes contre l’humanité, il était accusé d’avoir joué un rôle central dans le massacre du 28 septembre 2009, au cours duquel 156 personnes furent tuées et 109 femmes violées.

Sa cavale, qui avait alimenté l’inquiétude parmi les familles des victimes, prit fin près de sa région natale, en Guinée forestière. Son extradition et son incarcération à la maison centrale de Conakry furent saluées comme une avancée dans la lutte contre l’impunité.
Le 4 janvier 2024, la Guinée fut une nouvelle fois secouée par une révélation majeure. Le gouvernement militaire annonça avoir déjoué une tentative de coup d’État menée par un groupe de militaires, dont Abdoulaye D. Cissé, ancien capitaine du Bataillon autonome des troupes aéroportées. Ce dernier, dans une vidéo diffusée à la télévision nationale, déclara la création d’un Conseil national transitoire guinéen, avant de détailler les moyens mobilisés pour renverser le régime.

À la surprise générale, les présumés auteurs de cette tentative avortée bénéficièrent d’une grâce présidentielle accordée par Mamadi Doumbouya à l’occasion du Nouvel An. Cette décision suscita de vives réactions, notamment sur les réseaux sociaux, où de nombreux citoyens exprimèrent leur incompréhension face à l’absence de procès. Certains y ont vu un affaiblissement de l’autorité du gouvernement militaire.
En mai 2024, plusieurs médias privés guinéens ont été frappés par une décision de l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPT), qui a retiré leurs licences de diffusion. Cette mesure a touché six chaînes de télévision et stations de radio, dont Espace TV, Hadafo Médias, Fréquence Médias et Djoma Médias. La justification avancée par les autorités était que ces médias ne respectaient pas les « cahiers de charges » de leurs licences. En conséquence, ces stations ont cessé d’émettre, mettant ainsi plusieurs centaines de travailleurs au chômage et réduisant considérablement la liberté d’expression dans le pays.

Cette décision a provoqué l’indignation de nombreuses organisations de défense des droits de l’homme et de la presse, dont Reporters sans frontières (RSF), qui a dénoncé la répression croissante contre les médias en Guinée.
Le gouvernement militaire guinéen, dirigé par la junte, avait annoncé que la transition politique serait prolongée au-delà de 2024, contredisant ainsi les accords précédemment établis avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette annonce a ravivé les tensions, notamment avec le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), un collectif dissous par les autorités, qui menaçait de reprendre les manifestations pour exiger un retour à l’ordre constitutionnel. En Guinée, les manifestations étaient interdites depuis 2022, et de nombreux dirigeants de l’opposition, y compris des membres du FNDC, avaient été arrêtés, persécutés ou forcés à l’exil.

En 2024, la Guinée a été secouée par plusieurs événements marquants, notamment liés à des faits politiques et judiciaires. Le 9 juillet 2024, Oumar Sylla (Foniké Mengué) et Billo Bah, deux dirigeants du FNDC (Front National pour la Défense de la Constitution), ont été enlevés à leurs domiciles par des hommes cagoulés, semble-t-il des forces spéciales. Leur arrestation a eu lieu après des appels à relancer les manifestations de la société civile, notamment contre la fermeture des médias et la cherté de la vie, dans un contexte de revendications pour un retour à l’ordre constitutionnel.
L’ONU, les ONG et plusieurs personnalités politiques internationales ont rapidement réagi, demandant leur libération ou qu’ils soient présentés devant un juge. Le parquet guinéen a nié toute implication dans leur disparition, déclarant qu’aucun organe d’enquête n’avait procédé à leur arrestation. Leur sort est resté incertain, et des organisations comme la CPI ont été sollicitées pour enquêter sur leur disparition forcée.
Le 23 juillet, les épouses des deux activistes ont porté plainte contre les autorités guinéennes pour disparition forcée, et des accusations ont été formulées contre plusieurs hauts responsables, dont le général Mamadi Doumbouya. En août 2024, le FNDC a dévoilé une liste de personnes impliquées dans l’enlèvement, et l’ONG Afrikki a appelé à une mobilisation internationale, saisissant plusieurs institutions telles que la CEDEAO, l’UA, et la CPI.
Malgré l’expression de préoccupations par des entités internationales, telles que l’ambassade des États-Unis, l’Union européenne et la Fédération internationale pour les droits humains, le gouvernement guinéen n’a toujours pas apporté de réponses concrètes. 6 mois après leur disparition, des pressions croissantes se sont exercées sur les autorités de la transition guinéenne, dénonçant les violations des droits de l’homme et l’absence de justice pour les deux activistes.
Aliou
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